De Martin Luther à David du Plessis (en passant par MLK) - Pasteur Samuel FOUCART

De Martin Luther à David du Plessis (en passant par M.L.K.)

Tellement de croyants (terme dans lequel je classe aussi les pasteurs), se revendiquent de Martin Luther, de son courage, de son audace pour affronter la toute-puissance papale de l’époque. Ils sont, à les entendre les « dignes » héritiers de cet illustre prédécesseur !

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Martin Luther, petit moine allemand et catholique, scribe, chargé de recopier les textes du Nouveau-Testament, va amener dans le monde le vent de la révolte évangélique. Il sera le premier protestant, celui dont on se souvient du nom et celui qui va transformer le paysage « religieux » pour longtemps. Les termes qui définissent sa bravoure en disent long ; « Protestant » (tout est dit), « Reformé », faut-il en rajouter ? Le retour aux sources du salut, de l’Évangile, de la foi prônée par Jésus ! Tout y est !

Et que dire de la publication de ses « 95 thèses », connue sous l’appellation de « La Dispute sur la puissance des indulgences ». Ce texte est à l’origine de la Réforme protestante dans le Saint-Empire romain germanique. Le document aurait été placardé à la porte de l’église de la Toussaint à Wittemberg,  le 31 octobre 1517. Quel courage, quelle audace, au risque de me répéter !

Je ne sais pas si Martin Luther devrait se retourner dans sa tombe (expression pas très évangélique en soi), mais en tout cas il le pourrait… au regard des reculades, des compromissions, des prétendus échanges diplomatiques, de la séduction des autorités catholiques vis-à-vis des évangéliques, en vue de « ramener les frères égarés dans la maison » ! Qu’en penserait Martin Luther ? Mais au-delà, qu’en pense le Dieu de l’Église ?

Que nos chers frères luthéro-réformés se débrouillent avec leurs contradictions et leurs trahisons morales et spirituelles au regard de leur histoire ! Mais nous autres, évangéliques, pentecôtistes, charismatiques… qu’avons-nous à faire avec le catholicisme romain ? Qu’espérons-nous sérieusement trouver à cette source boueuse et asséchée ?  

Quand je démarrais mon pastorat, le pasteur David du Plessis était l’objet de toutes les critiques de la part de nos pères. Il représentait la trahison suprême des Pentecôtistes retournant vers un catholicisme romain pure et dure. Et ce au nom de l’ouverture, de la propagation des idées et de l’expérience pentecôtiste. Nous étions alors dans les années 1950 et il était hors de question de « pactiser » avec « l’ennemi doctrinal » !

Quelle ne fut pas ma surprise quand en 2015, suite à une conversation avec un groupe de tout jeunes pasteurs fraîchement reconnus au sein des historiques Assemblées de Dieu de France, j’entendis prononcer le nom de David du Plessis, comme étant, je cite « leur auteur préféré », leur référence en matière d’ouverture, le porteur d’une vision incomprise à l’époque, ces livres étant devenus « leurs livres de chevet » ! Désormais il fallait que ses idées soient remises au goût du jour dans les vieux mouvements poussiéreux se revendiquant du Pentecôtisme. Les bras m’en tombèrent (autre expression discutable, j’en conviens).

Des pasteurs pentecôtistes convertis au catholicisme, (ce qui a mes yeux reste un comble), il y en a eu. Et même si on ne peut pas vraiment dire cela de David du Plessis, d’autres iront jusqu’au bout des idées qu’il défendait à l’époque : Par exemple, le pasteur suédois Ulf Ekman et son épouse en 2014, le Portoricain Fernando Casanova en 2013, ou encore l’Américain Scott Borgman au début des années 2000. Tous avec l’intime conviction de pouvoir changer le système catholique de l’intérieur… Quelle utopie ! Mais au moins ceux-là ont été logiques avec leurs idées, contrairement aux promoteurs de l’unité œcuménique.

Il faut être un doux rêveur pour penser ou croire qu’en se compromettant avec le système catholique romain, on le changera de l’intérieur. Les choses étant verrouillées de l’intérieur depuis des siècles, ce ne sont pas quelques « petits » pentecôtistes faisant allégeances au catholicisme qui vont y changer quelque chose. Tous s’y sont cassés les dents, et y ont perdu leur âme, leurs valeurs et trahi leurs idéaux de foi et de courage.

Mais alors, le détour par M.L.K. c’est quoi en fait ? M.L.K., ou si vous préférez Martin Luther King, est devenu une référence « spirituelle » chez beaucoup de nos jeunes collègues évangéliques et pentecôtistes, je ne sais pas vraiment pourquoi. Certes son combat était des plus nobles et des plus justes. Oui il était un orateur hors pair. Évidemment que son assassinat en a fait à jamais un martyr du christianisme, mais c’est tout de même bien mal connaître l’histoire pour en faire une icône évangélique et pentecôtiste. M.L.K. était d’abord et avant tout un humaniste chrétien, à la fibre politique très marquée. Sa vie privée et son goût démesuré pour les jeunes femmes, n’en fait pas un modèle de sainteté évangélique. Et pourtant !

Ce qui plaît dans ce personnage c’est justement le côté « intouchable de l’icône » ! Tous les services secrets dignes de ce nom vous le diront, en matière de désinformation il est essentiel de fabriquer « des mythes incapacitants », consistant à dépeindre à l’envi une situation, un individu, un concept de telle façon que toute personne osant exprimer un avis contraire sera cloué d’office au pilori !

On ne touche pas à « l’esprit d’ouverture », (noter qu’on ne parle plus d’œcuménisme) ; il faut « travailler avec les autres dénominations chrétiennes » ; on ne doit surtout pas faire preuve de sectarisme doctrinal en abordant les questions qui fâchent, on doit « favoriser l’unité des chrétiens » etc. et malheur à qui ose dire le contraire ! C’est juste la mentalité humaniste qui est le propre, entre autres, de nos amis francs-maçons.

Petit à petit, sans s’en rendre compte, nous sommes passés de la glorieuse époque de la Réforme à la pénible compromission. Nous sommes partis de haut :  Martin Luther, pour en arriver beaucoup plus bas : Martin Luther King. Nous avons quitté le terrain de l’amour de la vérité et du courage pour camper à nouveau sur les sables mouvants de la religiosité.

Molière écrivait : « Mais que diable allait-il faire dans cette galère ? » (Les Fourberies de Scapin, acte II, scène 7). Et nous autres qu’allons-nous faire dans cette « galère de l’œcuméniquement correct » ? qui n’a qu’un seul but, (avouer depuis longtemps par les intéressés,) ramener « les frères égarés » dans le sein de la maison mère, comprenez l’église catholique romaine.

Samuel Foucart